Après une semaine d’intenses combats, les djihadistes contrôlent désormais la totalité de Palmyre. Une ville célèbre pour ses trésors archéologiques qui pourrait bientôt être détruite. Mais, au-delà de cette prise emblématique, où en est la lutte sur le terrain contre le groupe terroriste ? Le point sur la situation avec Karim Pakzad, chercheur à l’Iris et spécialiste de la région.
La prise de contrôle de Palmyre était-elle prévisible au regard de l’évolution du conflit syrien ?
Absolument. En Syrie, le régime est banni par l’Occident. Comme l’a dit un responsable iranien récemment : « Il y a là-bas une mini guerre mondiale », où une large coalition allant de la Turquie aux monarchies du Golfe, soutenus par des pays européens, font face à une dictature. Sauf que celle-ci voit désormais la moitié de son territoire dirigée par les djihadistes. Et la situation pourrait être pire : pas plus tard que la semaine dernière, le ministre iranien des Affaires étrangères l’affirmait : « Si l’Iran n’avait pas aidé la Syrie, l’Etat Islamique serait déjà au pouvoir à Damas. »
Peut-on s’attendre à une destruction de la partie antique de Palmyre ?
La prise de Palmyre ne doit rien au hasard. Elle est célèbre, notamment grâce à son inscription au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco. En s’en prenant à elle, c’est la garantie pour Daech d’un combat qui va être mondialisé. L’Etat islamique a prouvé depuis ses débuts sa maitrise de la communication. Après avoir brûlé, décapité, il se demande : quelle est la prochaine étape ? Ce fut la destruction des sites archéologiques irakiens, de Mossoul à Nimroud en passant par Hatra. C’est aujourd’hui la prise de Palmyre.
Le monde entier est mobilisé dans l’émotion pour regretter la destruction de ces sites historiques. C’est légitime, mais on devrait plutôt s’intéresser à ce qu’il pourrait se passer si Daech arrivait au pouvoir à Damas. Personne ne pose cette question essentielle : comment arrêter cette organisation ? Car si l’Etat islamique parvient à prendre Damas, la Syrie sera la Libye en puissance 10 !
Justement, les récentes avancées sont-elles un camouflet pour la coalition internationale ? Washington a annoncé ce jeudi sa volonté de « réexaminer » sa stratégie… Le gouvernement français vient d’annoncer que la situation sera au cœur d’une réunion internationale le 2 juin à Paris. J’espère que les Occidentaux ont pris conscience qu’il vaut mieux un dictateur affaibli comme Bachar al-Assad que l’Etat Islamique ! Autre paramètre à prendre en compte qui pourrait ralentir la coordination internationale : la rivalité historique entre l’Iran et l’Arabie Saoudite. Celle-ci n’a aucun intérêt à ce que les relations entre les Etats-Unis et l’Iran, après 30 ans de crise, se normalisent.
Sur le terrain, faut-il s’attendre à l’arrivée de troupes au sol ?
L’Irak ne manque pas d’hommes. Mais malgré la présence de nombreux soldats et de milices chiites très puissantes, son armée n’est plus au point depuis l’intervention américaine en 2003. Cette déroute face à l’Etat islamique est d’ailleurs l’échec du gouvernement irakien. Il est faible, il a des milliers de soucis à résoudre et demande de l’aide avec insistance.
Publié par : Métronews.fr
Légende : Vue générale du centre historique de Palmyre