Il y a dix ans exactement, réuni à Amsterdam, le CIO (Comité international olympique) décidait d’exclure l’Afrique du Sud du mouvement olympique. Dix ans durant lesquels les autorités de Pretoria et leurs nombreux amis en Europe et aux États-Unis ne cessèrent de multiplier les manœuvres pour faire rapporter la mise au ban ou tout au moins pour en réduire les effets.
Le gouvernement de Pretoria ne se priva pas de donner le maximum de publicité aux « changements » qui seraient intervenus dans le sport sud-africain par la vertu de la politique dite du « multinationalisme », représentée à l’extérieur comme « multiraciale ». D’où une équivoque habilement – et légalement – entretenue qui servira de prétexte ou de justification au maintien – ou à la reprise – de relations sportives avec l’Afrique du Sud.
« […] Par rapport à une dizaine d’années, affirment Hansen et Krug, deux dirigeants sportifs scandinaves, qui viennent de séjourner à Pretoria, le progrès est considérable au niveau des fédérations sportives qui font avancer les choses en prenant parfois de vitesse les lois […]. » Le même son de cloche se retrouve dans les rapports des commissions Marie (France) et Dick Jeeps (Grande-Bretagne). La première, composée de parlementaires français (tous appartenant aux partis de la majorité au pouvoir), dirigée par le député RPR des Pyrénées-Atlantiques et ancien arbitre de rugby, Bernard-Marie (1), et accompagnée par Albert Ferrasse, le patron du rugby français, a effectué en janvier dernier un « voyage d’étude » en Afrique du Sud. […] « On peut souhaiter la reprise des relations normales avec les fédérations suffisamment intégrées (football, athlétisme, boxe, escrime). » […] « Le moment est donc venu, écrit le quotidien parisien L’Équipe, de renouer les liens pour progresser encore vers la plus forte liberté humaine… »
« Tout cela, affirme le porte-parole et secrétaire général du Sacos (Conseil sud-africain du sport)(2), M. Nadarajan Pather, est cousu de fil blanc. On cherche à réhabiliter l’Afrique du Sud dans le domaine sportif. Le Sacos a rencontré Marie et Jeeps. Il leur a expliqué sa position et indiqué qu’il n’y a aucun changement et ce, dans aucun sport. »
Le sport en Afrique du Sud reste soumis aux lois fondamentales de l’apartheid dont aucune n’a été remise en question, a fortiori abrogée. […]
(1) Père de la ministre française Michèle Alliot-Marie (ndlr).
(2) Le Sacos regroupait toutes les fédérations non « raciales » qui rassemblaient des joueurs de toutes « races », y compris des Blancs anti-apartheid. Il était, bien sûr, exclu de tout financement ou appui officiel, ses dirigeants furent victimes de la répression et de l’agressivité des organisations racistes d’extrême droite (ndlr).